Metroid Dread : Dans l'espace, personne ne vous entend crier

 

De toutes les séries de Nintendo, Metroid est sans doute l’une des plus mythiques et des plus clivantes. Très populaire en Europe, elle est pourtant loin de faire partie des top ventes de la firme de Kyoto. C’est ce qui explique, en partie, les rares apparitions de Samus Aran – si l’on excepte ses caméos dans Super Smash Bros. Ainsi, ce Metroid Dread n’est que le cinquième épisode canonique d’une série de quinze titres (en comptant le volet Pinball et la compilation Prime) et ce n’est pas un hasard s’il était tant attendu par les fans. En effet, même si la franchise est passée dans les mains de studios occidentaux, Nintendo – par le concours de Yoshio Sakamoto – continue de superviser les aventures de sa chasseuse de primes. Tout en continuant de faire confiance à Retro Studios (dont on aimerait avoir des nouvelles pour Metroid Prime 4), elle s’est offerte les services de MercurySteam, un studio basé à Madrid. Forts d’une expérience réussie avec Samus Returns sur Nintendo 3DS, les développeurs ibériques reviennent avec une aventure qui intègre un nouveau concept : la fuite ! 

Alors que Samus Aran sillonne la galaxie, elle reçoit un message d’alerte. Le Parasite X, celui qu’elle pensait avoir éradiqué, a survécu sous la forme d’une bactérie capable de répliquer n’importe quel être vivant. Avant que les évènements n’échappent à tout contrôle, la chasseuse de primes fonce sur la planète ZDR pour répondre à la menace. À peine arrivée sur place, elle rencontre un puissant guerrier Chozo qui la cloue au sol. Vaincue et orpheline de toutes ses capacités, elle doit désormais se lancer dans un raid solitaire pour récupérer les facultés de sa combinaison et de son arsenal. Pas simple.

SEULE AU MONDE

Dans l’espace, c’est bien connu, personne ne vous entend crier. L’accroche culte d’Alien, le 8ème passager, qui est d’ailleurs l’une des sources d’inspiration de la saga, est plus que jamais d’actualité avec Metroid Dread. Samus Aran est seule et doit se frayer un chemin dans un dédale labyrinthique fait de portes verrouillées, de corniches surélevées et de secteurs hostiles, comme des zones plongées dans le magma. Dès les premières minutes, le joueur retrouve l’approche claustrophobique de la série avec ses couloirs tarabiscotés au possible. Respectant tous les codes de la franchise, l’épisode Switch s’appuie sur un gameplay extrêmement souple, mêlant exploration, action et plate-formes, avec ennemis à occire et boss gigantesques à défier. Pourtant, rapidement, on découvre que le level design n’est pas aussi poussé que celui d’un Super Metroid (qui reste un modèle en la matière). La carte, immense, est découpée en plusieurs secteurs joignables par un téléportateur et il n’est pas rare de multiplier les allers-retours. Le problème, c’est qu’il faut souvent se rendre sur la map (hachant par la même occasion le rythme du jeu) pour deviner où se rendre. En termes de lisibilité et d’ergonomie, le chef d’œuvre de la Super Nintendo avait l’intelligence de tout condenser dans une seule et même zone, chaque secteur (Tourian, Brinstar, Maridia, Norfair…) étant relié par un ascenseur. À mesure que l’on débloquait des capacités inédites, la progression coulait de source. Dans Metroid Dread, cette impression de « zone » (ou « flow » en anglais) n’est pas aussi prononcée. Même en détenant de multiples capacités, la planète ZDR reste hostile et on n’a pas cette sensation de maîtrise. Il est toutefois important de souligner que le level design demeure de qualité et que chaque secteur est extrêmement bien conçu. 

E.M.M.I MUSIC AWARDS

En dépit de cette petite faille, qui pourra gêner les novices, Metroid Dread possède de sérieux atouts pour séduire les amateurs de challenge et d’exploration. En effet, en se rendant sur ZDR, Samus apprend que les robots E.M.M.I, initialement destinés à l’éradication du Parasite X, ont été détournés de leur fonction principale. Désormais corrompues, ces machines effectuent des rondes dans certains secteurs de la planète et se mettent en chasse dès qu’elles détectent un intrus. Le problème, c’est qu’elles sont extrêmement dangereuses (une fois repérée, si elles attrapent la cible, c’est quasiment la mort assurée), rapides et inarrêtables. Ces entités, à la fois organiques et robotiques, sont la menace principale de Metroid Dread (terme qui signifie terreur), mais Samus va pourtant devoir s’y frotter pour récupérer ses capacités et progresser. C’est là que le concept de fuite prend tout son sens. Les E.M.M.I détectent chaque son dans un rayon assez large et ils sont capables de se faufiler dans les moindres recoins, rendant toute cachette difficile. Dans ces conditions, il arrive très souvent que la seule échappatoire soit de prendre ses jambes à son cou, jusqu’à prendre de la distance pour que ces satanées sentinelles perdent votre trace et déverrouillent les portes du secteur. Mais c’est aussi le seul moyen pour appréhender la menace et détecter les points faibles des belligérants magnétiques. Metroid Dread joue sur cet équilibre, entre prise de risques et fuite, pour sublimer la formule à mesure que l’on progresse. Et ça fonctionne très bien ! Chaque E.M.M.I a sa propre capacité et il est impossible d’avancer sans éliminer, un à un, les 7 exemplaires de ces machines infernales. Par ailleurs, les afficionados de grande spectacle ont de quoi faire avec les différents boss. Gigantesques et dangereux, ils sont, une nouvelle fois, de la partie et font tout pour arrêter la belle dans son long périple. Cela donne lieu à des affrontements épiques et il n’est pas rare de les vaincre sur le fil tant certains sont puissants. Mais là encore, le gameplay est si peaufiné et les commandes si réactives qu’on apprend rapidement à contourner leurs points forts pour retourner leurs compétences contre eux.

MOULTI PASS (SANITAIRE)

Pour progresser, Samus Aran peut compter sur un arsenal très complet. Disposant de différents types de missiles, elle est amenée à utiliser sa célèbre boule morphing (en se mettant en boule pour passer dans les conduits) ou encore à user d’attaques physiques pour riposter face à certains ennemis. Au fil de la progression, sa combinaison évolue, lui permettant d’accélérer soudainement, de passer en mode « translucide » temporairement (et donc invisible à l’œil des E.M.M.I) ou encore de résister à des températures extrêmes. Les fans de la saga ne seront donc pas dépaysés et trouveront dans Dread des références multiples aux précédents épisodes. Les E.M.M.I sont nés de l’inspiration des séquences d’infiltration de Metroid Fusion tandis que Super Metroid a servi de base à la conception du level design. Toutes ces réflexions gravitent autour de Metroid Dread et montre la polyvalence de la chasseuse de primes à mesure qu’elle s’enfonce dans les profondeurs de ZDR. Metroidvania oblige (en même temps, c’est la série qui a créé le genre), c’est en récupérant chaque capacité que l’on peut ouvrir de nouvelles portes, découvrir des zones inédites et débusquer toutes sortes de raccourcis. 

SOBRIÉTÉ ARTISTIQUE

Disponible en même temps que la Switch OLED, Metroid Dread est une belle vitrine pour l’écran de la petite dernière de Nintendo. Extrêmement soigné, le jeu affiche de superbes animations et les décors, loin d’être immobiles, participent grandement à l’ambiance semi-organique de l’aventure. On apprécie d’autant plus les moments où la caméra dézoome pour marquer le gigantisme de certaines zones, qu’il s’agit de lave en fusion, d’énormes machines ou d’un océan venant fouetter ses vagues sur les parois. On sera moins dithyrambiques pour la mise en scène, assez plate et ne mettant pas vraiment en valeur Samus. Mais ce petit défaut ne saura pas nous faire oublier la réalisation globale, très positive. Côté son, Metroid Dread vient chatouiller les oreilles avec des mélopées qui rappelleront les moments passés sur consoles 8 et 16-bits. Metroid reste une série d’ambiance et la musique est volontairement discrète avant d’aller crescendo lors des combats contre les boss. Au final, et même si tout n’est pas parfait, on retient que Metroid Dread est une formidable expérience, qui sera peut-être un peu trop générique aux yeux de certains, mais qui propose quelques belles heures d’action et d’exploration.


TRÈS BON

Sans profiter de la lisibilité et du level design exceptionnels d’un Super Metroid, cette aventure de Samus Aran ne trahit pas les codes de la série et offre quelques moments épiques avec les E.M.M.I. Généreux et doté de combats de boss exquis, Metroid Dread a aussi un gameplay très solide (qu’il s’agisse des phases de shoot ou des déplacements ultra fluides de la chasseuse de primes). MercurySteam devait avoir une certaine pression sur les épaules et le studio espagnol n’a pas failli à sa mission. Assurément l’un des titres de l’année et, probablement, l’une des meilleures pioches de toute la ludothèque Switch !

 

Points positifs :

Une ambiance réussie

Le retour de Samus Aran

Les phases contre les E.M.M.I

La qualité des boss

Une réalisation très soignée

La fluidité des déplacements

Les séquences de shoot maîtrisées

Le challenge au rendez-vous

 

Points négatifs :

La carte est un sacré foutoir

Mise en scène un peu plate

Certaines commandes auraient mérité plus de simplicité

 

Éditeur : Nintendo / Développeur : MercurySteam / Genre : Action-Aventure / Date de sortie : 8 octobre 2021 / PEGI : 12 / Support : Nintendo Switch

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